Titre original : Café com leite
Titre anglais : You, Me and Him
Dirigé et écrit par : RIBEIRO Daniel
Genre : Drame
Pays : Brésil
Durée : 18 minutes
Un soir, je m’ennuyais. Alors je suis allé sur Youtube perdre mon temps. J’ai écouté de la musique et regardé des vidéos. Et sans trop savoir pourquoi, je me suis mis à taper le mot-clé « court-métrage » dans la barre de recherche. J’ai ainsi regardé des petites œuvres cinématographiques, pour certaines réalisées par des amateurs. J’ai enchainé ces courtes vidéos. Et de clic en clic, je suis tombé sur le court métrage Café com leite. Les acteurs parlaient en portugais mais il y avait des sous-titres en anglais. À la fin du visionnage, je m’étais dit « bah, c’est vraiment pas mal ! ». Oui, c’est pas mal. Pas excellent, mais pas mal. Ça ne m’a pas empêché pourtant d’avoir un coup de cœur pour ce court-métrage qui a reçu de nombreux prix. Un coup de cœur que j’ai eu envie de vous faire partager.
Synopsis :
Quand Danilo propose à son petit-copain Marcos d’emménager ensemble, il apprend le même jour que ses parents ont péri dans un accident. Ses plans d’avenir changent alors du tout au tout. Il doit s’occuper de son petit-frère Lucas qui est encore à l’école primaire.
Ma critique de Café com Leite
Ce court-métrage est sorti en 2007. RIBEIRO Daniel, le réalisateur avait alors à peine 25 ans. En regardant sa filmographie, c’est l’une de ses premières œuvres. Ce qui fait que c’est parfois un peu maladroit dans la réalisation et dans le script, sans pour autant être atterrant. Ce sont des erreurs de jeunesse facilement pardonnables car elles n’entravent en rien le visionnage en lui-même.
J’ai senti qu’il n’y avait pas beaucoup de budget dans ce court-métrage. Heureusement, le réalisateur a pu contourner cette difficulté intelligemment. À vrai dire, l’histoire s’inscrit dans la vie de tous les jours. Il n’y a donc pas eu besoin de créer des décors extravagants et couteux.
Le réalisateur a décidé de ne faire pratiquement que des plans fixes qui sont parfois mal cadrés (certains étaient intentionnels, d’autres, je ne sais pas trop…). Il n’y a que très peu de mouvements de la caméra durant tout le film. En fait, chaque scène est un plan fixe (avec parfois un changement d’angle de prise de vue qui sera lui-même fixe). Ce sont les personnages qui créent le mouvement en se déplaçant dans un plan statique. Ça fait rudimentaire mais ça marche quand même. D’ailleurs, j’ai trouvé ces déplacements poétiques car ça cassait le rythme et c’était lent. Les personnages se déplacent en prenant tout leur temps comme s’ils étaient sereins. J’ai ressenti une certaine quiétude en regardant la plupart des scènes.
Concernant le son, ce sont les bruitages naturels qui ont été utilisés (bruit de porte, bruit du micro-onde…). Il n’y a pas de musique en bruit de fond. Et s’il y a de la musique, les personnages ne parlent alors pas car ce sont des scènes d’introspection.
Café com Leite met en scène trois personnages, donc trois acteurs. Il n’y a pratiquement aucun figurant (et s’ils le sont, ils ont été certainement filmés à leur insu car à la fin du film, on peut voir un mec marcher en regardant fixement en direction de la caméra). Les scènes se focalisent entièrement sur les trois protagonistes. Le jeu d’acteur est convaincant car tout le monde reste naturel. Personne ne surjoue le personnage qu’ils incarnent. Les acteurs sont très pudiques dans leurs émotions et dans leur embarras. Ça change des séries américaines qui passent leur temps à exagérer leur jeu afin de créer un effet humoristique.
Concernant l’histoire, elle reste assez simple mais elle a été personnellement bien traitée. De plus, le réalisateur a eu la bonne idée de ne mettre aucun cliché sur les gays. En effet, Danilo et Marcos sont homosexuels et c’est considéré comme normal durant tout le film. En fait, ils auraient pu être hétérosexuels comme bisexuels, cela aurait été pareil. Ce qui fait que le thème du film n’est absolument pas l’homosexualité. Les thèmes abordés sont le deuil et les effets du deuil sur la vie de couple. Ce sont des thèmes difficiles à traiter car on tombe très souvent dans le larmoyant et la caricature. Mais le réalisateur s’en sort avec brio car il a décidé de rester sobre. Je vais vous expliquer comment il est parvenu à ce résultat.
La vie de couple de nos deux tourtereaux est bel et bien affectée après la mort des parents de Danilo, car ce dernier doit s’occuper de son petit frère Lucas. Il doit l’emmener à l’école, lui préparer le petit déjeuner… Il a donc moins de temps à consacrer à Marcos qui n’est pas du tout empathique à son égard. Marcos est un peu égoïste et il est déçu du comportement de Danilo. Il ne le dit pas explicitement mais il le suggère dans son attitude. Par contre, Danilo comprend le comportement de son amoureux mais il campe sur ses positions pour le bien de Lucas. Comme dans de nombreux couples, dans de tels passages à vide, la communication est bloquée. Il y a trop de non-dits entre Danilo et Marcos. Aucun des deux n’exprime clairement ce qu’ils veulent réellement. Ils appliquent la politique de l’autruche. Il n’y a pas de disputes entre eux. Seulement de l’embarras.
Toutefois, Marcos décide de faire des efforts en allant chez Danilo et en allant chercher Lucas à l’école. Au début, Lucas n’est pas à l’aise avec Marcos mais il finit par l’accepter. Ce qui n’est pas du tout le cas de Marcos qui n’arrive toujours pas à trouver sa place dans ce nouveau foyer. Il se sent de trop. En fait durant tout le film, Lucas et Marcos se disputent sans le montrer l’amour de Danilo qui est le pivot central de cette histoire. Il s’agit d’un triangle relationnel.
La fin du film est ambigüe. Vous pouvez l’interpréter négativement comme positivement. Le réalisateur a fait exprès de faire planer le doute sur le devenir de la relation entre Danilo et Marcos. Me concernant, ils sont toujours ensemble à la fin. Et je pense que l’auteur pense comme moi. Pour moi, Marcos part en vacances seul pour ne pas gaspiller les billets. Danilo lui répond qu’il aurait aimé l’accompagner mais la grippe l’en empêche. Pourquoi Danilo aurait-il dit ça s’ils n’étaient plus ensemble ? Et pourquoi l’accompagne-t-il ? C’est vrai qu’il aurait pu dire cela en tant qu’ami. Mais ça me parait trop gros !
Donc, j’ai vraiment apprécié Café com Leite malgré un côté un peu amateur dans la réalisation. L’histoire va directement à l’essentiel. J’ai senti la complicité entre Danilo et Marcos, trahie par certains détails. Par exemple, lorsque les trois sont dans le canapé, Danilo caresse les cheveux de Marcos en lui faisant une petite tape. Ces gestes ne sont pas très visibles car ils sont dans la pénombre. Mais ce genre de petits détails rend une œuvre cinématographique beaucoup plus crédible et réaliste. J’ai bien aimé la réserve des personnages que certains pourraient détester pour manque d’expressivité. J’ai été touché par la sobriété de ce court-métrage. Bref ! Gros coup de cœur.
Si vous avez aimé Café com Leite, je vous recommande de visionner Eu Não Quero Voltar Sozinho, un court-métrage du même réalisateur.